L'analyse d'une déclaration d'utilité publique DUP dans un dossier d'expropriation

Publié le 15 Juillet 2017

L’article 545 du Code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

L’article L 1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose quant à lui que l'expropriation, en tout ou partie, d'immeubles ou de droits réels immobiliers ne peut être prononcée qu'à la condition qu'elle réponde à une utilité publique préalablement et formellement constatée à la suite d'une enquête et qu'il ait été procédé, contradictoirement, à la détermination des parcelles à exproprier ainsi qu'à la recherche des propriétaires, des titulaires de droits réels et des autres personnes intéressées. Elle donne lieu à une juste et préalable indemnité.

L’enquête portant sur une déclaration d’utilité publique répond à des règles découlant de la jurisprudence du Conseil d’État;

Depuis 1971, l'utilité publique d'une opération d'expropriation est subordonnée à l'appréciation par le juge administratif de tous les aspects, aussi bien positifs que négatifs, de l'opération contestée. Aux termes de cette jurisprudence dite du bilan coût-avantages,  une opération d'expropriation ne peut être légalement déclarée d'utilité publique si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente » (CE, ass., 28 mai 1971, n° 78825, min. Équip. et Log. c/ Féd. défense personnes concernées par projet actuellement dénommé "Ville nouvelle Est", arrêt complété par l’arrêt CE, sect. N° 78829, 20 oct. 1972, Sté civile Sainte-Marie de l'Assomption)

Ainsi le juge administratif, en effectuant une balance entre les avantages présentés par l’opération projetée et ses inconvénients, peut censurer des opérations dont l'objet même, les conditions de réalisation ou le coût lui apparaissent dénués de rapport avec les moyens dont dispose l'expropriant, avec les besoins des administrés, avec la gravité des atteintes portées à la propriété privée, à la protection de l'environnement naturel, à la sauvegarde de monuments et de sites protégés, voire même au bon fonctionnement de services publics existants.

L'arrêt n° 343070 Commune de Levallois-Perret du 19 octobre 2012 a permis au Conseil d’État d'exposer clairement la méthodologie que doit suivre le juge dans l'exercice de ce contrôle.

 

Lorsqu'il est amené à se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, le juge doit contrôler successivement trois points :

 

  1. que l'opération répond à une finalité d'intérêt général,
  2. que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine,
  3. que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.

 

Selon cette méthode, avant de procéder au bilan des coûts – avantages de l'opération, le juge doit vérifier que l'opération projetée correspond bien à un intérêt public et que l'expropriation est bien rendue nécessaire par la réalisation de cette opération.

 

Mais, la distinction entre la question de légalité et celle qui relève de l'opportunité est ténue car on peut en effet légitimement penser que le contrôle d’une solution alternative entre dans la logique de la théorie du bilan. En effet, il serait étonnant de considérer qu'une déclaration d'utilité publique soit légale, alors même qu'un autre parti répondrait aux finalités d'intérêt général tout en engendrant des inconvénients moindres.

 

Ce raisonnement nous incite à vérifier dans le contrôle des déclarations d'utilité publique qu'il n'existe pas de solution alternative au parti retenu, qui porterait une atteinte moins grave aux différents intérêts en cause, et notamment au droit de propriété.

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